Archive pour mai 2011

Le Neuf 3, DSK et le Bronx ….

Jeudi 19 mai 2011

Source : oumma.com, jeudi 19 mai 2011
Par Badia Benjelloun
(….)
Il est exigé de l’opinion de la retenue, de la sérénité à l’endroit d’un homme connu pour sa perversion sous prétexte que l’inculpé doit bénéficier de la présomption d’innocence. Mais qu’en a-t-il été de la position de l’actuel prévenu dans l’affaire augurale d’une dérive ‘sécuritaire’ et surtout stigmatisante de la fausse agression du RER D en juillet 2004 ? Une jeune femme mythomane avait dénoncé un délit imaginaire au cours duquel de jeunes Arabes et Noirs l’auraient violentée, elle et son bébé de 13 mois. Le récit agrémenté de dessins au feutre sur la peau de son ventre, représentant des croix gammées inversées, avait mobilisé toute la classe politique et médiatique contre cet acte antisémite honteux. Une fois exposé le résultat de l’enquête, qui a révélé la teneur mensongère de la plainte, Strauss-Kahn interrogé sur ses condamnations hâtives et inopportunes de la jeunesse des banlieues, répondait sur Antenne 2 au journal télévisé de 20 heures, le lundi 12 juillet :

« Si c’est un coup monté, évidemment ça serait critiquable en tant que coup monté, mais ça changerait rien au fait que c’est la dixième ou la vingtième des agressions de ce genre. Même si celle-ci se révélait après coup, on en sait rien pour le moment, ne pas s’être exactement passée comme on vous le raconte, ce qui est sûr c’est qu’il y en a eu 20 avant ! » .

Lui sera-t-il appliqué par mesure de réciprocité et selon le principe de l’universalité, les mêmes règles compassionnelles ? La justice devra-t-elle se faire expéditive et se contenter du seul et confortable argument du « vraisemblable » , ici dans le cas de l’affaire du RER D du rendu vraisemblable, en renonçant à la recherche du vrai ? La victime de son acte prédateur, Nafissatou Diallo, a émigré dans la banlieue de New-York depuis sa Guinée natale sous l’effet d’une mondialisation qu’il a aidée à parachever. Elle aurait pu tout aussi bien être la sœur ou la cousine d’un de ces Noirs qui auraient assailli la mythomane du train de banlieue du neuf trois..

 » QUOTAS DANS LE FOOTBALL FRANCAIS : LE RETOUR DES CLICHES ? »

Mercredi 4 mai 2011

NETTALI.NET – Les révélations de Médiapart, le journal en ligne français, ont fait l’effet d’une bombe. Lors d’une importante réunion tenue le 08 novembre 2011, les responsables de la fédération française de football et des techniciens dont le Dtn et le sélectionneur national, ont taillé bavette autour d’un chiffre : 45 % des jeunes actuellement dans les petites catégories de l’équipe de France sont des binationaux !

Mais que de clichés : tous les jeunes de 1,90 m et 85 kg déjà en petite catégorie ne sont pas des futurs Patrick Vieira. Mais en se projetant dans l’avenir et au regard des tendances lourdes qui se dessinent, les responsables incriminés ont partagé la peur de voir la fameuse formation à la française profiter à d’autres.

Le Sénégal a battu la France en match de la coupe du monde asiatique en 2002 avec une légion de joueurs évoluant en première division française, la plupart formés là-bas. Ce sont des clins d’œil de l’histoire. Puissante comme la vague sonore qui accompagne les chœurs de supporters anglais, c’est surtout le moment d’un retour de bâton,

Faut-il mettre en place des « quotas » basés sur l’origine ethnique du joueur ? Naturellement, la discussion se voulait confidentielle, mais dans une démarche très « Wikileaks », le journal en ligne a révélé l’ampleur du malaise. Faut-il s’en étonner ? La France a des problèmes avec « son » identité. Une équipe nationale ayant une importante force de représentation identitaire, le racisme dans le football ne pouvait plus se contenir dans les marginalités des groupuscules d’extrême-droite qui pullulent dans les stades européens.

Le Dtn François Blancquart a été suspendu de ses fonctions pour une semaine alors que le sélectionneur des « Bleus », Laurent Blanc a présenté ses excuses à ceux que ses propos ont choqué. Malaise. Dimanche 1er mai sur Canal +, l’actuel capitaine de l’équipe de France, Alou Diarra, né en France de parents maliens, a juré qu’il n’avait jamais senti une once de racisme dans le comportement de celui que l’on surnomme « le président », en raison de son charisme et de sa classe en tant que joueur. Laurent Blanc raciste ? Difficile à croire ! Et même si c’était le cas…

Champion du monde 89, avec la génération « Blancs-Blacks-Beurs », Laurent Blanc s’était récemment signalé pour déplorer « le cas » Mousssa Sow, actuel meilleur buteur de Ligue 1 sous les couleurs de Lille et membre de la sélection A des « Lions » du Sénégal. Il a fait toute sa formation dans l’hexagone et a porté l’équipe de France en petite catégorie. Naturellement, le sélectionneur de l’équipe de France regrette de ne pas l’avoir dans son effectif…

Rattrapée par son passé colonial et ses vagues d’émigration successives des années d’après-guerre, la France et son football posent un problème finalement politique. Ses emblèmes sont devenus colorés. Dans un contexte ravivé par un discours politique traumatisé par les thèses du Front national -qui a le vent en poupe dans les sondages politiques-, cette affaire-là n’est pas simple comme une série de jonglages. Le choix d’un joueur de défendre les couleurs d’un pays tient surtout à une décision intime, qui est dans la plupart des cas dictée par l’opportunité sportive d’abord, le lien sentimental ensuite, et, malheureusement, dès fois, par « le mercenariat ». Le football et l’identité nationale s’entremêlent.

Dans le cas précis de la double idée qu’il y a trop de joueurs d’origine étrangère en équipe de France et de la pertinence à continuer une politique de formation dont ils ne sont pas assurés de tirer, seuls, des bénéfices, les dirigeants du foot français vivent les traumatismes de leur classe politique dont celle qui est au pouvoir actuellement sous la houlette du président Sarkozy ne cache pas ses tendances xénophobes. Mais à qui la faute ? On ne le dira jamais assez : la France est assise sur une identité nationale très forte mais construite sur un passé ouvert sur le monde.

Aujourd’hui, elle dit être présente partout militairement où ses « devoirs » l’appellent. On ne dit toujours pas que c’est la Légion étrangère –composée dans sa grande majorité d’apatrides- qui est la première sur le théâtre des opérations. Elle a fait un débat monstre avant d’accepter de voir un « black » présenter son journal télévisé. Pape Diouf, ex-président de l’Om, a passé beaucoup de temps à défendre le bien-fondé de sa présence à ce niveau malgré tout son bagout. Flash-back…

C’est en 1931 que l’arrière-gauche Raoul Diagne devient le premier non français de souche à revêtir le maillot tricolore. Il est le fils de Blaise Diagne, ancien sous-secrétaire d’Etat aux colonies, et donc premier noir à devenir ministre de la république française. L’Allemagne franchira le pas en 1974, alors que le pays du foot, l’Angleterre, ne vivra l’expérience qu’à la coupe du monde de 1978 (la sélection du joueur Viv Anderson fera naître une intense polémique). Ancienne plus grande puissance coloniale au monde, l’Angleterre, administrant ses territoires sous la loi de « l’indirect rule », connaîtra moins d’affinités –la langue en moins- avec le Nigéria, le Ghana ou encore le Kenya. Or, avec sa politique d’assimilation, la France entendait réunir sous la République ses colonies. Au lendemain de la deuxième guerre mondiale c’est une vague migratoire qui atteint la France.

LES FAUX CLICHES

Les français constatent, sans doute avec une gêne pour certains, que la plupart de leurs plus grands joueurs sont d’origine étrangère : Kopa, Platini, Zidane. Avant eux, le marocain Larbi Ben Barek –qui a passé 16 ans en équipe de France, a écrit les belles pages du foot hexagonal sans jamais avoir obtenu la nationalité française, selon l’enquête réalisée par le journaliste Christophe Cassiau-Haurie.

Il évoque également le franco-béninois Lucien Cossou dans les années 60 et le franco-sénégalais au destin tragique, Jean-Pierre Adams dans les années 70. L’explosion a lieu dans les années 80 quand les enfants d’émigrés nés en France percent dans le football ; ils ont pour nom Jean Tigana, Gérald Passi ou Basile Boli. La génération de 1998, championne du monde, illustrera à merveille, cette tendance. Combien de « gardes noires » pour parler des défenseurs centraux « blacks » qui ont fait l’histoire du foot français ? La réalité du racisme dans le football (surtout en Italie) et les problèmes d’intégration dans la société française, vus sous le regard d’un « black » respecté, pousseront d’ailleurs l’ex-défenseur Lilian Thuram, d’origine antillaise, à faire son entrée en politique.

Avec la fin de la limitation du nombre de joueurs communautaires en Europe, pour pallier à l’inflation des salaires des professionnels qui a en découlé, les clubs ont commencé à puiser dans leurs centres de formation. Qui y étaient ? Pour la plupart, des jeunes issus de l’immigration… La caractérisation physique –qui rappelle de sinistres thèses- fait son bonhomme de chemin. Pour gagner des trophées, « il faut des monstres physiques derrière et au milieu défensif ; les géniaux techniciens blancs –de préférence petits- feront le reste ! » C’est un faux cliché comme celui qui fait croire aux femmes blanches que les africains ont des sexes imposants !

Les quotas migratoires ne sont plus un tabou. Jean-Marie Le Pen est arrivé au second tour de la présidentielle face à Jacques Chirac en 2002. Aujourd’hui, le Front national n’est plus une formation politique marginale. Elle fait plus qu’apporter de mauvaises réponses à de bonnes questions : son discours s’est « humanisé » pour certains et attire les classes défavorisées. L’effet télévisuel des « blacks » et « beurs » en nombre dans l’équipe de France a fait mouche. Surtout que certains parmi eux rechignent à chanter « La Marseillaise ». La France à des problèmes avec son passé.

Les dirigeants de son football, on ne peut attendre moins d’eux, ont la responsabilité de penser à son avenir. La tentation sera alors forte de « ferrer » les jeunes joueurs dès leur première apparition sous le maillot de l’équipe de France. Grand dilemme, mais question bête : peut-on forcer un homme à jouer pour une équipe ? Attention à l’auto-goal !

A lire aussi http://www.africultures.com/php/ind…

Lamine Sèn